Des délais d’attente plus longs pour obtenir un pardon
Depuis l’adoption du projet de loi C23B, sous forme de la loi omnibus sur le crime (loi C10) des conservateurs, j’ai pu constater une explosion de commentaires négatifs sur ce blogue. Je tiens donc à faire le point sur ce sujet contentieux et à exprimer mon propre sentiment de déception devant cette loi profondément troublante.
Sous sa forme initiale, la loi sur le casier judiciaire stipulait un délai d’admissibilité de 3 ans pour une condamnation par procédure sommaire, et de 5 ans pour une condamnation par voie de mise en accusation. L’homme d’affaire en moi ne voyait aucun problème avec la loi telle qu’elle était, car je savais qu’une modification à la loi entrainerait d’importants changements au niveau de la paperasse gouvernementale. Mais après de nombreuses conversations avec mes clients et d’autres individus touchés de près et de loin par le pardon j’ai adopté un point de vue plus flexible. Je me suis dit qu’il serait effectivement plus juste de faire la part entre les individus ayant écrit un mauvais chèque ou cultivé quelques plantes interdites, et ceux ayant commis des délits violents.
Pour résumer, le gouvernement conservateur, minoritaire à l’époque, a introduit le projet de loi C23 visant à prolonger les délais d’admissibilité à 5 ou 10 ans. Le projet de loi n’a pas été adopté, mais a tout de même suscité l’intérêt des médias, en partie à cause de l’histoire de Karla Homolka qui était sur le point de devenir admissible à demander un pardon. Même si cette « nouvelle » était déjà connue de tous ceux qui travaillent dans le domaine de la justice pénale, elle a fait des remous auprès du grand public, et a servi de trame de fond pour tout le débat entourant la sécurité publique.
Évidemment, personne n’était ravi à l’idée de voir Karla Homolka pardonnée, et pourtant en raison de la procédure juridique employée lors de son procès, il s’agissait d’une éventualité possible. De toute évidence une solution était nécessaire.
Le NPD a alors proposé de diviser le projet de loi C23 en deux, ainsi donnant lieu au projet de loi C23A qui visait a empêcher Karla Homolka d’obtenir un pardon. Ce projet de loi a également remanié les périodes d’attente (anciennement de 3 ou 5 ans), afin d’imposer un délai d’admissibilité de 10 ans pour les infractions violentes ou à caractère sexuel. Sur ce point il n’y a eu aucune objection, car un système fondé sur des délais d’admissibilité de 3, 5 ou 10 ans est tout à fait raisonnable.
Mais si le projet de loi C23A mettait de côté les mesures les plus draconiennes du projet de loi C23, le projet de loi C23B a eu pour but de les réintroduire. J’ai moi-même été invité a participer au débat par le comité permanent de la sécurité publique et nationale, mais hélas la politique a eu raison de l’intérêt des citoyens.
Forts de leur majorité parlementaire, les conservateurs ont fait adopter le projet de loi C23B ainsi que les nouveaux délais d’admissibilité. Dorénavant, la période d’attente sera de 5 ou 10 ans, sans exception. Le gouvernement n’a jamais expliqué en quoi des délais de 5 ou 10 ans seraient préférables à des délais de 3, 5 ou 10 ans, je suppose car il n’y a pas de raisonnement sérieux à l’origine de ce changement.
Alors si vous cherchez à comprendre le pourquoi de toute cette histoire, ne soyez pas déçus si vous ne trouvez pas de réponse satisfaisante, car il n’y en a pas. Je participe activement à ce débat depuis le début et moi-même je ne n’y vois aucune logique. De toute évidence, le fait que le gouvernement soit si pressé à saboter un programme dont le taux de réussite se situe à 96% témoigne d’une totale déconnexion de la réalité.